Les belles du Nord

Certaines personnes ont parfois des lubies inexplicables. J’en fais partie.

Il y a quelques années, je m’étais intéressé à une découverte archéologique qui avait eu lieu tout près de chez moi, dans la ville d’Orchies. Il s’agissait de quatre statues religieuses enfouies à quelques mètres du sol (1m50). Trois de ces statues avaient été retrouvées dans un excellent état, car elles avaient été déposées avec soin puis protégées au fil des années par une gangue d’argile étanche.

Autant d’éléments qui suscitèrent chez moi un intérêt, quoiqu’un peu lointain parfois. Mais lorsque j’appris qu’une conférence allait avoir lieu pour présenter les avancées sur le projet, je n’ai pas hésité longtemps avant de prendre mon appareil photo et de m’y rendre d’un bon pas.

C’est une fois dans la salle, que je me suis aperçu que je rentrais dans l’Histoire. Et c’est avec un public, d’un âge certain, que nous nous sommes installés pour en connaître un peu plus après cette restauration spectaculaire qui venait d’avoir lieu.

Je peux le dire maintenant, le résultat est de toute beauté. Mais avant de courir les voir au palais des Beaux-Art de Lille, je vous invite à partager avec moi quelques-unes de mes découvertes.

C’est la modératrice Mme Françoise Verrier, présidente de la société historique du Pays de Pévèle qui introduit le sujet.

C’est par hasard que ces statues furent trouvées en 2003, lors d’un diagnostic archéologique, avant le début de travaux en plein centre-ville.

Le caractère exceptionnel de cette trouvaille fut alors renforcé par des éléments troublants.

Le style de ces statues tout d’abord est particulièrement soigné et très riche en détail. Et ce qui en fait une découverte particulièrement intéressante, c’est leur très bon état de conservation. Aux dires de monsieur Ludovic DEBS, responsable scientifique de l’INRAP, c’est la seule fois où il a eu l’occasion et la chance de trouver des statues complètes de cette intégrité.

Un autre élément intéressant que nous a expliqué Laëticia Barragué-Zouita, conservatrice du département du Moyen Âge, Renaissance au palais des Beaux-Arts, c’est la manière dont elle a identifié l’une des deux statues féminines. Car une personne avait pris soin d’enlever les attributs permettant de la nommer. Ce fut donc par comparaison à d’autres statues et par la présence de petits reliefs sur la jambe (identifié comme des pattes d’un agneau) qui permit de retrouver son nom : Sainte Agnès.

Mais le plus intéressant fut sans doute de tenter de résoudre l’énigme : qui a enfoui ces statues ? C’est avec monsieur Gauthier Baert, professeur d’histoire au Collège du Pévèle d’Orchies, que nous avons parcouru les différentes hypothèses.

Tout d’abord, les différentes strates de terre ont permis de déterminer la période où elles ont été ensevelies ; durant la Révolution française. Mais à cette époque, les objets de valeurs étaient recherchés pour leur matériau (or, bronze), parfois par leur rareté (quelques tableaux), mais on ne protégeait jamais de simples statues en pierre.

C’est donc, documents à l’appui, que nous avons échafaudé quelques hypothèses. Est-ce que ça aurait pu être l’armée française, ou même la Prussienne ? Peu probable. Le curé de la paroisse ? Non, il est rapidement devenu un révolutionnaire convaincu. Un charretier ? Il avait la possibilité de déplacer des statues de ce poids (200 kg). Et pourquoi pas, le propriétaire du terrain ? Il est assez rare, en effet, que l’on enterre des objets de valeurs sur le terrain du voisin.

Il y a là, vous en conviendrez, matière à spéculation.

Et maintenant, n’avez-vous par envie de les voir en vrai ?

Et d’ailleurs, pour information, il me semble que le palais des Beaux-Arts de Lille est toujours gratuit les premiers dimanche de chaque mois.